Rav Yehuda Amital

amital-portrait1-4066757Une semaine après le décès du Rav Mordechai Eliyahou zatsal, un autre grand nous a quitté. Le Rav Yehuda Amital zatsal, Rosh Hayeshiva de Har Etzion (Gush Etzion) est parti le 27 Tamouz 5770 (9/07/10).

Je n’ai malheureusement pas eu la chance de le connaître personnellement, mais j’ai toujours été émerveillé par les enseignements entendus en son nom, par ses écrits et par sa vaste pensée qui intégrée Torah, Peuple et terre d’Israël.

Le Rav Amital, né en 1924 en Roumanie, étudia dans son enfance auprès des plus grands maîtres d’Europe de l’Est. Après avoir vécu l’enfer de la Shoah alors qu’il n’était qu’adolescent, il monta en Israël ou il continua à étudier la torah au sein de la célèbre Yeshivat Hevron.

Cependant, si le Rav Amital profite au mieux de l’excellent niveau de la Yeshiva, il n’adhère pas du tout aux pensées de ses maîtres. Très vite, il commence à se rendre régulièrement au cours du Rav Yaacov Harlap – élève du Rav Kook et Rosh Yeshiva de Merkaz Harav – ce qui le met en froid avec les dirigeant de sa Yeshiva.

Durant la guerre d’indépendance, il s’engage dans la Hagganah. Quelque années plus tard, il résumera son expérience en tant que soldat religieux dans un essai intitulé « La voie du soldat religieux durant la guerre d’indépendance ».

Après la guerre, il épouse la petite-fille du Rav Isser Zalman Melzer – dirigeant de la Yeshiva Etz-Hayim du vieux Yishouv qui fut aussi le maître de sommités comme le Rav Shach, le Rav Auerbach, le Rav Goren et le Rav Aron Kotler.

Le Rav Amital enseigna au coté du Rav Shach à la Yeshivat Hadarom puis fonda la Yeshiva Har Etzion qu’il dirigea dans une parfaite harmonie avec le Rav Aron Lichtenstein chlit »a.

Un des éléments frappant dans la vie du Rav Amital fut sa capacité à se remettre en question et à changer ses positions. De plus, la devise du Rav Amital était le kidoush Hachem, la sanctification du nom divin. Le Rav Amital affirma plus d’une fois que là ou il pensait être en mesure de réduire le hilloul hachem il ne pourrait se taire – quitte à subir les foudres du public ou des autres rabbins…

Ainsi, après la guerre des six jours, le Rav Amital fonda la Yeshiva Har Etzion en plein Gush E amital-2560413tzion délivré. A cette époque, il ne cachait pas son appartenance au mouvement pour le « Grand Israel » ainsi que ses opinions très à droite.

Après le guerre de Kippour, où il perdit huit de ses proches élèves, le Rav Amital changea de camp et lutta pour la paix même au prix de concessions territoriales. A ceux qui l’accusèrent d’avoir retourné sa veste après la mort de ses élèves, le Rav répondit simplement que cela était vrai. En effet, son amour d’Eretz Israël ne dépassait pas son amour de la vie. Pour lui la Torah étaitTorat Hayim -une torah de vie avant tout.

Dans cette optique, le Rav Amital fonda le parti Meimad, parti politique religieux-sioniste proche du centre gauche.

Sa capacité à revoir ses positions apparaît aussi dans un tout autre domaine : celui de l’éducation des jeunes filles religieuses. Le Rav Amital adhérait initialement à l’avis religieux populaire qui ne voit pas grand intérêt à ce que les jeunes filles approfondissent la Torah. Sous l’influence du Rav Lichtenstein, le Rav admit son erreur et devint un des plus fervents partisans de l’étude pour femmes. Il participa d’ailleurs à la fondation de la Midreshet Migdal Oz, bastion du féminisme religieux.

Grand admirateur du Rav A. Y. Kook, le Rav Amital traversa l’horreur de la Shoah avec le livre Orot en poche, son secour spirituel en ces heures si sombres. Arrivé en Israël, il devint aussi un disciple du Rav Harlap. Cependant, il s’opposa aux compilations des écrits du Rav Kook réalisaient par le Rav Zvi Yehuda (fils du Rav Kook) et aimait souligner qu’il était l’élève du Rav Kook, pas du Rav Zvi Yehuda.

Une de ses grandes douleurs était de voir la pensée unique gagner le judaïsme religieux. Ainsi que l’a illustré le Rav David Brofsky dans son Hesped, le Rav Amital se plaignait de l’absence de rabbanim sioniste-religieux à l’enterrement du Rav Yaacov Weiss (Av Beit Din de la Eda Hahareidit) ainsi que de l’absence de rabbanim haredim à l’enterrement du Rav Shlomo Goren (ancien grand rabbin d’Israel).

Pour lui, la morale divine ne saurait contredire la morale humaine et la perte des valeurs universelles au sein du public religieux ne pouvait qu’être la preuve d’une erreur présente à la racine même de l’éducation religieuse. Pour imager ses paroles, le Rav Amital aimait citer cette célèbre histoire hassidique :

On raconte que le Baal Hatanya étudiait un jour dans sa maison quand il entendit les pleurs d’un nourisson. Il se leva, partit consoler l’enfant et revint étudier. Soudain il s’aperçut que son fils, père de l’enfant, se trouvait dans la pièce d’à coté – plongé dans son étude. Le Baal Hatanya lui demanda pourquoi n’avait-il pas consolé l’enfant. Son fils lui répondit que sa concentration était telle qu’il n’avait pas entendu les pleurs. Le Rav lui dit que si son étude ne lui permettait pas d’entendre les pleurs d’un enfant, c’est que son étude n’était pas saine.

Personnalité complexe et travaillée, le Rav Amital consacra sa vie à la Torah. Une Torah qui était destinée à apporter la vie, à rapprocher les éloignés et à éclairer les nations. Les dizaines de milliers d’élèves présents à son enterrement ainsi que les grandes personnalités rabbiniques qui firent son Hesped témoignent de sa grandeur et de l’amour que lui portait le public.

Quelques cours du Rav Amital sont disponibles en anglais sur le site de la Yeshiva Har Etzion : http://vbm-torah.org/rya-articles.htm

* la plupart des élèments biographiques sont tirés de la biographie du Rav Amital,Beemunato par Eliayashiv Reichner – Yediot Sefarim. *

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