Plus je suis strict, plus je suis religieux ?
אמר רבי יעקב אמר רבי יוחנן: אין עושין חבורה שכולה גרים, שמא ידקדקו בו ויביאוהו לידי פסול.
Rabbi Yaacov enseigne au nom de Rabbi Yochanan : « on ne fait pas de réunion (pour manger le sacrifice pascal) composée uniquement de convertis, car il est à craindre qu’ils se montrent trop pointilleux et en viennent à fauter.1
Rashi commente : qu’ils se montrent trop pointilleux -comme ils ne sont pas érudits, ils voudront se montrer plus stricts et commettrons une erreurqui invalidera la bête.
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Il me semble que sociologiquement parlant, la plupart des juifs religieux contemporains considèrent qu’il y a du bon à se montrer plus strict que ce qu’exige la Halakha. Les Houmrot(conduites plus strictes que ce qui est demandé) sont d’ailleurs devenues un indice sociale pour « classer » les juifs religieux entre-eux. Plus quelqu’un est « mah’mir », plus il est religieux.
Les h’oumrot ont toujours existé, même s’il me semble que leur impact était bien plus restreint chez les générations précédentes. Quoi qu’il en soit, la célèbre formule כל המחמיר תבוא עליו ברכה, celui qui se montre plus stricte est digne de bénédictions, ne date effectivement pas d’hier.
Cependant, durant des siècles les juifs vivaient en petites communautés, chacune dirigée par un rabbin local, seul référence en matière de Halakha. Chaque communauté avait ses traditions bien établies, que nul ne songeait à remettre en question. Brusquement, la situation changea. Les juifs quittèrent leurs pays d’origines pour se regrouper dans des grands centres mondiaux, les états-unis ou Israël. Ce brutal déracinement provoqua la perte des traditions. Un juif marocain pouvait alors avoir pour rabbin local un lituanien, un hassid se retrouvait avec un rabbin tunisien, etc… Lorsque ce juif rencontrait un doute dans la Halakha, il n’avait d’autre choix que de s’adresser au rabbin local, qui répondait selon les coutumes de sa propre ex-patrie. De nos jours, la facilité des échanges rend les choses encore plus compliquées. Il devient possible de contacter n’importe quel rabbin d’un simple coup de téléphone et chacun peut avoir accès à des millions d’avis rabbiniques en quelques clics sur google. Cette situation a pour conséquence un large melting-polt des minhaguim (coutumes), qui constituent une part essentielle de la Halakha. Mais que faire lorsque nous ne connaissons plus nos lois d’origines ? La plupart des juifs religieux d’aujourd’hui se contentent de « choisir » parmi l’ensemble des propositions qui leur est présenté.
Certains suivront toujours l’avis le plus permissif, même si cela est totalement contraire à leurs coutumes, d’autres – plus pratiquants – pencheront pour l’avis le plus stricte. Après tout, mieux vaut trop que pas assez !
Cette tendance moderne, qui consiste à se montrer toujours plus stricte, n’est en réalité pas juste. La Halakha accorde bien plus d’importance à la préservation des minhaguim qu’aux houmrot. C’est volontairement que j’ai choisi de ne citer quasiment que des rabbins ashkénazes dans mon billet, afin de bien mettre en valeur que même au sein des communautés jugées comme plus strictes, toute houmra à ses limites.
***
À une personne qui lui demandait si elle pouvait appliquer une houmra n’ayant jamais été appliquée, le Rav Ytsraq Yaakov Weiss répond ainsi :
« Si malgré tout [ce que nous avons expliqué plus haut] quelqu’un veut se montrer plus strict, il peut agir ainsi chez lui et de façon discrète […]. Mais s’il agit ainsi en public, il transgresse ce qui est écrit dans le traité Pessachim : « un homme n’agira pas de façon différente, afin de ne pas éveiller de discordes ». Les décisionnaires ont considérés cette attitude comme parfaitement interdite […] ! De plus, il est à craindre qu’une telle attitude soit orgueilleuse, puisqu’aucun Juste n’a jamais agit ainsi. […]. »2
Le Rav Weiss (1902-1989) ne fut nul autre que le Av Beth Din de la Edah Haharedit, une des institutions les plus conservatrices du monde ultra-orthodoxe. Pourtant, il estime que l’introduction de nouvelles pratiques plus strictes mène à deux interdits majeurs : 1) ne pas créer de discordes au sein du peuple juif, 2) ne pas se conduire avec orgueil.
***
Rav Moshé Fenstein (1885-1986) fut l’un des plus grands décisionnaires du siècle dernier. Comme le Rav Weiss, lui aussi s’oppose à l’introduction de nouvelleshoumrot .
- à un homme qui lui demande s’il est permis de mettre des dessins de maguen david dans une synagogue, car ce symbole n’a pas de sources dans le judaïsme et qu’il est en plus devenu un symbole sioniste (le questionneur est de toute évidence antisioniste), Rav Fenstein répond :
» Il est de notoriété publique que depuis plusieurs siècles [les juifs parent] les objets religieux d’étoiles de David, sans que cela n’éveille les moindres protestations. Et bien que nous ne connaissons pas la source de cette coutume, cela n’est absolument pas grave. Même si cela n’a pas d’explication, je ne vois pas de raison d’interdire ce qui se fait depuis plusieurs siècles avant l’apparition du sionisme, à une époque où il n’avait pas d’hérétiques dans nos synagogues. […] »3
- Dans une autre lettre, Rav Fenstein répond à quelqu’un qui lui demande s’il est nécessaire d’utiliser les moyens modernes pour se montrer plus strict dans la Halakha. Faut-il chercher les insectes aux microscopes ? Faut-il faire destefilines carrés avec une précision laser ?
« [il n’est pas nécessaire d’utiliser tout ces moyens] et cela est une chose évidente pour nous. En effet, toutes les générations précédentes, composées de génies, justes et pieux, n’utilisaient pas de microscopes. Pourtant, il est certain qu’elles respectaient toutes les lois de la Torah et qu’elles ne fautaient pas, même par faute de moyens ! »4
Même si nous ne connaissons plus les raisons de certains usages, il ne nous est pas permis de les annuler alors que des générations de juifs les ont fait. À la houmra, Rav Fenstein oppose le bon sens et la tradition.
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Rav Ménashé Klein (1923-2011) était l’Admour d’Ungvar et l’un des grands décisionnaires du 20e siècle. Ses responsas sont parues en plus d’une quinzaines d’ouvrages sous le nom de Mishné Halachot.
En réponse à un homme qui lui demande quel mal y a t-il à se montrer plus strict, il répond :
» J’ai écrit et parlé de nombreuses fois à ce sujet. Aujourd’hui, chacun se crée sa propre estrade et se montre plus ou moins stricte, selon sa volonté. Ce n’était pas ainsi qu’agissaient les générations précédentes, desquelles nous avons reçu la Torah et le respect des mitsvot. Un homme ne se permettait pas de bouger à droite ou à gauche, mais se pliait à la tradition qu’il avait reçu! »5
Pour Rav Klein, il est hors de question de se montrer plus strict que ne l’étaient les générations précédentes. À l’inverse, il convient de suivre leurs conduites en agissant chacun selon sa tradition.
***
Je voudrai conclure ce billet par les mots de Rabbi Baroukh Tolédano (1890-1970), célèbre rabbin marocain du 20e siècle, qui siégea à la tête du tribunal rabbinique de Meknès. Dans son kitsour Choulkan Aroukh, Rav Tolédano va jusqu’à légiférer les houmrot afin d’éviter les dérives. Pour lui, il est hors de question que chacun invente ses propres pratiques ou agisse au dépend d’autrui. Il écrit :
« Bien qu’il soit établi que « celui qui se montre plus strict est digne de bénédictions », cela est uniquement lorsqu’il s’agit : a) d’une loi discutée. b) [D’une Houmra] qui ne porte pas atteinte à autrui.
Mais, s’il s’agit d’une loi acceptée unanimement et que l’on décide tout de même de se montrer plus strict [que la loi ne l’exige], alors sur cela nos sages ont dit : « Tout celui qui est dispensé de quelque chose et le fait quand même est appelé imbécile » (T.Y Brachot 2:9).
Et à plus forte raison si [cette houmra] porte atteinte à autrui. Dans ce cas, [cette houmra] est interdite, car [agir ainsi] c’est mépriser l’autre. C’est pourquoi [que dans ces cas là] nous n’avons pas le droit de nous montrer plus stricts ». »6
À mon avis, cette halakha gagnerait à être plus connue du grand public. Se montrer plus strict peut être une attitude très respectable, à condition d’agir avec bon sens, et de ne pas perdre l’ordre des priorités ! Illustrons ces propos par un exemple classique : celui de la casherout, domaine de prédilections des mah’mirim de tout poils.
Manger une casherout très select, voilà qui est digne d’éloge. Refuser de manger chez son voisin, son ami, ses parents (!) sous prétexte qu’ils mangent casher, mais « pas assez », voilà qui est totalement interdit.
On comprend mieux ce que disait Manitou : « la Casherout, cache la route », c’est à dire : ne perdons pas l’ordre des priorités.
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6Rabbi Baroukh Tolédano, kitsour Choulkan Aroukh, Volume 2, 420:10
Salut,
J’imagine alors que tu ne deviendras pas membre de ce club:
http://people.hofstra.edu/daniel_j_greenwood/ganzehgalus/chumra.htm
:))
Bonjour,
Tout d’abord, je voudrais dire que l’article est appréciable et que partage bien entendu ce qui est dit dedans. J’ai d’ailleurs donné un shiour cet après-midi sur la voie du milieu selon hilkhot
déot et le quatrième chapitre des shmona prakim, et j’arrive à des conclusions similaires. Le Yérouchalmi rapporté est assez éloquent et traduit bien l’esprit de l’article : « ce que la Torah t’a
interdit ne te suffit-il pas pour que tu doives encore y ajouter d’autres prohibitions » (TJ Nédarim 9, 1). Tu as vu dans le même esprit que les responsa citées dans le billet le shou »t du Rama que
je recopie à l’attention d’Emmanuel qui n’a pas la chance d’être dans le BHF :
ובתשו’ הרמ »א (ס »ס נד) כ’, ומ »ש מעכ »ת להחמיר על עצמו שלא לאכול משמן זית שנמצא בחביות עץ, מפני שמחליקים את החביות בשומן חזיר, מאחר שכתבנו כל הני טעמי להיתר, ופוק חזי מאי עמא דבר, אינו רשאי להחמיר על
עצמו, כדאמרי’ בירוש’ [פ »ב דע »ז ה »ח] רבי ובית דינו התירו השמן, שמואל אכל, רב לא קבל עליה מיכול, א »ל שמואל אכול ואי לא אנא כתב עליך זקן ממרא, אטרח עליה ואכל. והובא בתוס’ (ע »ז לו). וכן אמרו בירושלמי
[פ »ט דנדרים ה »א], לא דייך מה שאסרה תורה אלא שאתה אוסר עליך דברים אחרים. והפטור מדבר ועושהו נקרא הדיוט. ומה שהביא מעכ »ת ראיה מיחזקאל שלא אכל מבהמה שהורה בה חכם, לא דמי לנ »ד, שמנהג פשוט בכל ישראל
לאוכלו, ולית דחש ביה כלל. עכת »ד
(en résumé il met aussi en garde contre les ‘houmrot)
Pour quelque chose de pratique qui concerne tout le monde, voir au sujet de ces fameuses ‘houmrot de Pessa’h ce qu’écrit Rav Ovadia Yossef :
שו »ת יחווה דעת חלק א סימן יא
והנה אחינו האשכנזים נהגו להחמיר בכל זה כדברי הרמ »א הנ »ל, שלא לאכול בשר ודגים וגבינה כשלא נזהרו לשומרם באופן מיוחד שיהיו כשרים לפסח, וגם מבני עדות המזרח יש חסידים ואנשי מעשה המחמירים על עצמם בכל זה.
וישראל קדושים קבלו על עצמם חומרות רבות בפסח משום חומרות האיסור של החמץ. אולם הרב המורה הוראה לרבים צריך להורות כדעת מרן שקבלנו הוראותיו בין להקל בין להחמיר. וכמ »ש מרן החיד »א במחזיק ברכה (סי’ תס »ז
סק »ה), שאף שכל אחד נוהג להחמיר על עצמו בהלכות פסח כאשר תאוה נפשו, את צנועים חכמה להחמיר רק בביתו ובחומותיו, וכל מה שיוכל יתחמק מלגלות מסתוריו לבני אדם. ותלמיד חכם שהגיע להוראה יורה על פי הדין דוקא
ע »כ. וכן כתב בשו »ת חקרי לב (חאו »ח סי’ צ »ה – צ »ו) ובמהדורא בתרא (חלק חושן משפט, דף ק »פ ע »ג), שדיין ומורה צדק אינו רשאי להורות נגד דעת מרן שקבלנו הוראותיו. וכן כתב בשו »ת תעלומות לב ח »ב (חלק אבן העזר
סי’ ה’, דף י »ז ע »ב והלאה). ואמנם הרה »ג אלקלעי בספר זכור לאברהם (ריש הלכות פסח) כתב, אנו נוהגים להחמיר כדעת הרמ »א בדין חוזר וניעור בממשו, ובכל דיני פסח, באופן שלענין פסח אנו אשכנזים. כן אמר לי הרה »ג
עט »ר מר רב »י ע »כ. ונמשך אחריו הרה »ג ר’ יעקב סופר בכף החיים (סי’ תמ »ז אות ע »ו ורכ »ח, ובסימן תס »ז אות קי »ז ועוד) ע »ש. אולם באמת שהעיקר כדברי מרן החיד »א במחזיק ברכה הנ »ל, שגם בדיני פסח אין הרב המורה
רשאי להורות לאחרים אלא על פי הדין דוקא, וזהו כדעת מרן השלחן ערוך שקבלנו הוראותיו. וכן כתב הגאון ר’ אברהם ענתבי בספר חכמה ומוסר (דרך חקיך אות צ »ג), שיותר טוב שלא לנהוג כסברת מי שאומר חוזר וניעור
בפסח, אלא כדעת מרן השלחן ערוך שפסק אינו חוזר וניעור. ועל זה נאמר: אל תהי צדיק הרבה. ועל ידי כך ינצל מכמה מכשולות. ובשאר דברים שנחלקו הפוסקים ראוי לתלמיד חכם להחמיר על עצמו ולהקל לאחרים ע »כ. וכן כתב
הרה »ג ר’ משה שתרוג בשו »ת ישיב משה ח »א (סי’ קפ »ח): קבלנו שבכל מקום שהגאון ר’ יצחק טאייב הכריע בספרו ערך השלחן להחמיר נגד דעת מרן, רק לעצמו היה מחמיר, אבל לאחרים היה מורה להקל כדעת מרן שקבלנו
הוראותיו ע »כ. וכ »כ בשו »ת שואל ונשאל ח »ג (סי’ כ »ג). ועיין להרא »ש (נדה פרק י’ סי’ ג’) שכתב: שאנו אין לנו להחמיר אלא מה שמוצאים בש »ס, ואם אדם חשוב מרוב ענותו ופרישותו אינו רוצה לסמוך על עצמו לעשות
מעשה להקל, ינהג מדת פרישותו לעצמו, אבל לא ניתן ליכתב בספר להורות בו חומרא לדורות הבאים, וכל שכן שלא יורה אדם להחמיר לאחרים מדעתו אם לא שיביא ראיות ברורות מן הש »ס. וכבר אמרו חכמים לרבן גמליאל,
(בביצה כא ע »ב), מה נעשה לבית אביך שהיו מחמירים על עצמם ומקילים לכל ישראל ע »ש. וכ »כ הב »ח (יו »ד סי’ קפ »ז). והנודע ביהודה קמא (חיו »ד סי’ מ »ו). ע »ש. ועיין בתשובה מאהבה ח »א (סי’ קפ »א) שכתב, מי ששגג
והורה לאסור לאחרים שלא כדין, חמור עונשו ממי ששגג והורה להקל שלא כדין, שהאחרון חטאו בין אדם למקום, ושב ורפא לו, אבל הראשון חטא בחטא שבין אדם לחבירו שאפילו יום הכפורים אינו מכפר וכו’. (וראה עוד
בתשובה מאהבה ח »ג תשובה שעה). ולכן בדבר המבואר בשלחן ערוך, אין למורה לפסוק לאחרים (מהספרדים ועדות המזרח) נגד דעת מרן, בין להקל בין להחמיר. (וראה בשו »ת יביע אומר ח »א חיו »ד ס »ס =סוף סימן= ג’). והשי »ת
יצילנו משגיאות, ומתורתו יראנו נפלאות. ויאיר עינינו במאור תורתו הקדושה. אמן.
(en résumé , si quelqu’un veut être ma’hmir cela le regarde mais un Rav n’a pas le droit d’enseigner la ‘houmra directement , juste la stricte halakha)
Cependant, il y a quelque-chose qui me dérange dans cet article et dans d’autres :
La voie du juste milieu consiste à s’écarter des excès dans les deux sens. Il ne s’agit pas de s’en prendre uniquement à ceux qui en font plus, mais aussi à ceux qui en font moins. Et pourtant on
ne voit jamais -quasiment- des appels à respecter la stricte halakha dans le blog.
Regarde le nombre de « likes » sur cet article ainsi que sur ceux qui dénoncent les excès des « religieux’. Pourquoi les gens aiment-ils plus ces articles que les autres ? Parce qu’ils sont d’une
meilleure qualité ? Je ne le pense pas. Ce billet comme les autres est très intéressant et bien référencé. Mais ceux qui ont 50 « likes » de moins le sont également.
Une partie des lecteurs préfère ce genre d’articles car ça les conforte dans leur pratique , tout autant éloignée de la voie du milieu, mais dans l’autre sens. J’ai été choqué d’entendre sur
France-Info le journaliste se régaler de « la marche des salopes » qui a eu lieu à Jérusalem, des femmes manifestant contre les discriminations sexuelles… jusque-là d’accord…… quasiment nues en
déambulant comme-ça aux yeux de tous.
Voici un aussi un excès qu’il convient de condamner tout autant sinon plus que la ‘houmra à l’excès ! J’aimerais bien voir dans le blog un billet qui remette les points sur les « i » sur ce genre de
dérives antireligieuses.
Pour rester dans la voie du juste milieu, il faut regarder chaque cas avec objectivité. Au sujet de la perruque et des pantalons pour femmes tu as mis en avant des « mélamdé z’hout ». Très bien. Mais
quand il s’agit de ceux qui vont au-delà de ce que la Halakha demande, tu n’en trouves aucun, alors qu’il est aussi possible de juger favorablement. Par exemple, il faut garder à l’esprit que les
extrêmes attirent les extrêmes, et que la course à la ‘houmrot n’est sûrement rien d’autre qu’une réaction contre la course à la débauche que l’on voit actuellement.
Dans les mots du Rambam ça passe mieux :
« Cependant , s’il est vrai qu’à certaines époques , quelques sages ont orienté leur conduite vers l’un des extrêmes (…) ils l’ont fait tout simplement à titre de remède (…) et aussi à cause de
la corruption des gens de la ville. Voyant qu’en les fréquentant et en observant leurs actes, ils risquaient de corrompre leurs propres dispositions à ce contact, ils s’en sont éloignés (…) »
(chmona prakim- 4)
Évidemment le Rambam fustige par la suite ceux qui pensent que la ‘houmra à l’excès est bonne en soi, mais il permet d’apporter un début de limoud z’hout sur ceux qui en font trop.
J’ai appris beaucoup sur la MO grâce à toi depuis le temps que je fréquente le blog, et je ne prétends pas te donner de leçons dans ton domaine. Ceci-dit, dans « modern-orthodox » il y a aussi
« orthodoxe » et quand on essaye de vivre une vie de Halakha, on doit aussi savoir taper du poing sur la table pour s’élever contre cette corruption des mœurs et le non respect effronté de la Torah.
Même si on est moderne.
En toute amitié
Yona
Shavoua Tov,
Pour ajouter une anecdote à votre blog (lu sur universtorah) au sujet de Rav Shlomo Zalman Auerbach :
Un homme s’était un jour présenté à lui pour une question halakhique pratique : dans la mesure où le principe du ‘Erouv est souvent sujet à caution, il souhaitait faire preuve de rigueur à ce sujet
et prendre sur lui la ‘houmra de ne plus porter davantage dans le domaine public le jour du Chabbat.
Mais à la place des compliments qu’il s’attendait à recevoir, la réponse que lui donna Rav Chlomo Zalman n’abonda pas du tout en son sens : « Rien ne vous retient de continuer à agir suivant la
coutume de vos parents. Mais sachez que si vous souhaitez prendre sur vous une rigueur supplémentaire, il vous faut en premier lieu étudier la question et approfondir les différents aspects
halakhiques. C’est seulement une fois que vous serez convaincu de la pertinence d’une ‘houmra qu’il conviendra de l’appliquer ! Mais il ne faut en aucun cas se contenter d’imiter simplement les
‘rigueurs’ des autres ! ».
Très intéressant comme toujours!
L’analyse historique que tu fais des raisons pour lesquelles les Juifs modernes sont désemparés devant la multiplicité des autorités, et la perte des repères traditionnels rejoint certaines
questions que je me pose, je crois t’en avoir déjà évoquées quelques unes. De vraies questions se posent: quelle est la tradition du fils d’un père d’origine algérienne par son père et polonais par
sa mère, qui a appris le judaïsme par son grand père maternel, et d’une mère d’origine russe par son père communiste athée et de mère italienne convertie au judaïsme?
Hannah Arendt définissait dans la crise de la culture, si j’ai bonne mémoire, l’homme cultivé comme celui qui sait choisir ses amis parmi les vivants comme parmi les morts, et j’aime beaucoup cette
idée qui se rapproche de ces questions de minhaguim et de houmrot puisqu’il s’agit de choisir ses maîtres dans la tradition héritée comme parmi les vivants…
Aujourd’hui au fond, chacun est libre de choisir sa communauté. Demain peut-être il n’y aura plus d’identité entre une communauté physique, une synagogue, et les allégeances halakhico-théologiques
de ses membres. Tu ne réponds pas, et ne cherches pas à répondre, à la question de savoir comment choisir. Tu mets simplement en garde contre la tentation, qui est grande, de juger systématiquement
plus « légitime » l’avis le plus « strict » et le plus contraignant. Il n’en reste pas moins que beaucoup de juifs « désirent » ces contraintes. Et même ceux qui les refusent pour eux-mêmes pensent le
plus souvent que la plus grande contrainte est la marque de la plus grande ferveur et de la plus grande rigueur. Ce qui accentue encore la difficulté à s’inscrire dans une tradition « choisie »
Une autre question m’est venue à la lecture de l’avis du Rav Fenstein sur l’utilisation de moyens modernes, qui est importante. Je ne sais pas en effet si l’argument qu’il utilise est celui que je
trouve le plus convainquant. Je ne comprends pas la notion de « faute par manque de moyens ». Est-ce une catégorie de la torah? Y a-t-il des exemples de fautes qu’on pourrait commettre par manques de
moyen, ou n’est-il pas toujours et par principe admis, comme je le croyais, que le respect de la torah se mesure à l’échelle de nos moyens? Inversement, est-ce qu’au nom de cet argument, il faut
rejeter la recherche d’écailles d’esturgeons au microscrope? Est-ce que ce n’est pas une catégorie un peu commode, qui permet sans l’afficher de dénoncer comme ridicule, et culpabilisatrice, l’idée
d’inventer une nouvelle houmra pour cette seule raison qu’il existe de nouveaux moyens techniques de contrôler le respect de certains interdits?
Merci. Ma question est: qu’est-ce qu’une « faute par manque de moyens », cette catégorie existe-t-elle et en a-t-on des exemples?
Salut,
J’imagine alors que tu ne deviendras pas membre de ce club:
http://people.hofstra.edu/daniel_j_greenwood/ganzehgalus/chumra.htm
:))
Bonjour,
Tout d’abord, je voudrais dire que l’article est appréciable et que partage bien entendu ce qui est dit dedans. J’ai d’ailleurs donné un shiour cet après-midi sur la voie du milieu selon hilkhot
déot et le quatrième chapitre des shmona prakim, et j’arrive à des conclusions similaires. Le Yérouchalmi rapporté est assez éloquent et traduit bien l’esprit de l’article : « ce que la Torah t’a
interdit ne te suffit-il pas pour que tu doives encore y ajouter d’autres prohibitions » (TJ Nédarim 9, 1). Tu as vu dans le même esprit que les responsa citées dans le billet le shou »t du Rama que
je recopie à l’attention d’Emmanuel qui n’a pas la chance d’être dans le BHF :
ובתשו’ הרמ »א (ס »ס נד) כ’, ומ »ש מעכ »ת להחמיר על עצמו שלא לאכול משמן זית שנמצא בחביות עץ, מפני שמחליקים את החביות בשומן חזיר, מאחר שכתבנו כל הני טעמי להיתר, ופוק חזי מאי עמא דבר, אינו רשאי להחמיר על
עצמו, כדאמרי’ בירוש’ [פ »ב דע »ז ה »ח] רבי ובית דינו התירו השמן, שמואל אכל, רב לא קבל עליה מיכול, א »ל שמואל אכול ואי לא אנא כתב עליך זקן ממרא, אטרח עליה ואכל. והובא בתוס’ (ע »ז לו). וכן אמרו בירושלמי
[פ »ט דנדרים ה »א], לא דייך מה שאסרה תורה אלא שאתה אוסר עליך דברים אחרים. והפטור מדבר ועושהו נקרא הדיוט. ומה שהביא מעכ »ת ראיה מיחזקאל שלא אכל מבהמה שהורה בה חכם, לא דמי לנ »ד, שמנהג פשוט בכל ישראל
לאוכלו, ולית דחש ביה כלל. עכת »ד
(en résumé il met aussi en garde contre les ‘houmrot)
Pour quelque chose de pratique qui concerne tout le monde, voir au sujet de ces fameuses ‘houmrot de Pessa’h ce qu’écrit Rav Ovadia Yossef :
שו »ת יחווה דעת חלק א סימן יא
והנה אחינו האשכנזים נהגו להחמיר בכל זה כדברי הרמ »א הנ »ל, שלא לאכול בשר ודגים וגבינה כשלא נזהרו לשומרם באופן מיוחד שיהיו כשרים לפסח, וגם מבני עדות המזרח יש חסידים ואנשי מעשה המחמירים על עצמם בכל זה.
וישראל קדושים קבלו על עצמם חומרות רבות בפסח משום חומרות האיסור של החמץ. אולם הרב המורה הוראה לרבים צריך להורות כדעת מרן שקבלנו הוראותיו בין להקל בין להחמיר. וכמ »ש מרן החיד »א במחזיק ברכה (סי’ תס »ז
סק »ה), שאף שכל אחד נוהג להחמיר על עצמו בהלכות פסח כאשר תאוה נפשו, את צנועים חכמה להחמיר רק בביתו ובחומותיו, וכל מה שיוכל יתחמק מלגלות מסתוריו לבני אדם. ותלמיד חכם שהגיע להוראה יורה על פי הדין דוקא
ע »כ. וכן כתב בשו »ת חקרי לב (חאו »ח סי’ צ »ה – צ »ו) ובמהדורא בתרא (חלק חושן משפט, דף ק »פ ע »ג), שדיין ומורה צדק אינו רשאי להורות נגד דעת מרן שקבלנו הוראותיו. וכן כתב בשו »ת תעלומות לב ח »ב (חלק אבן העזר
סי’ ה’, דף י »ז ע »ב והלאה). ואמנם הרה »ג אלקלעי בספר זכור לאברהם (ריש הלכות פסח) כתב, אנו נוהגים להחמיר כדעת הרמ »א בדין חוזר וניעור בממשו, ובכל דיני פסח, באופן שלענין פסח אנו אשכנזים. כן אמר לי הרה »ג
עט »ר מר רב »י ע »כ. ונמשך אחריו הרה »ג ר’ יעקב סופר בכף החיים (סי’ תמ »ז אות ע »ו ורכ »ח, ובסימן תס »ז אות קי »ז ועוד) ע »ש. אולם באמת שהעיקר כדברי מרן החיד »א במחזיק ברכה הנ »ל, שגם בדיני פסח אין הרב המורה
רשאי להורות לאחרים אלא על פי הדין דוקא, וזהו כדעת מרן השלחן ערוך שקבלנו הוראותיו. וכן כתב הגאון ר’ אברהם ענתבי בספר חכמה ומוסר (דרך חקיך אות צ »ג), שיותר טוב שלא לנהוג כסברת מי שאומר חוזר וניעור
בפסח, אלא כדעת מרן השלחן ערוך שפסק אינו חוזר וניעור. ועל זה נאמר: אל תהי צדיק הרבה. ועל ידי כך ינצל מכמה מכשולות. ובשאר דברים שנחלקו הפוסקים ראוי לתלמיד חכם להחמיר על עצמו ולהקל לאחרים ע »כ. וכן כתב
הרה »ג ר’ משה שתרוג בשו »ת ישיב משה ח »א (סי’ קפ »ח): קבלנו שבכל מקום שהגאון ר’ יצחק טאייב הכריע בספרו ערך השלחן להחמיר נגד דעת מרן, רק לעצמו היה מחמיר, אבל לאחרים היה מורה להקל כדעת מרן שקבלנו
הוראותיו ע »כ. וכ »כ בשו »ת שואל ונשאל ח »ג (סי’ כ »ג). ועיין להרא »ש (נדה פרק י’ סי’ ג’) שכתב: שאנו אין לנו להחמיר אלא מה שמוצאים בש »ס, ואם אדם חשוב מרוב ענותו ופרישותו אינו רוצה לסמוך על עצמו לעשות
מעשה להקל, ינהג מדת פרישותו לעצמו, אבל לא ניתן ליכתב בספר להורות בו חומרא לדורות הבאים, וכל שכן שלא יורה אדם להחמיר לאחרים מדעתו אם לא שיביא ראיות ברורות מן הש »ס. וכבר אמרו חכמים לרבן גמליאל,
(בביצה כא ע »ב), מה נעשה לבית אביך שהיו מחמירים על עצמם ומקילים לכל ישראל ע »ש. וכ »כ הב »ח (יו »ד סי’ קפ »ז). והנודע ביהודה קמא (חיו »ד סי’ מ »ו). ע »ש. ועיין בתשובה מאהבה ח »א (סי’ קפ »א) שכתב, מי ששגג
והורה לאסור לאחרים שלא כדין, חמור עונשו ממי ששגג והורה להקל שלא כדין, שהאחרון חטאו בין אדם למקום, ושב ורפא לו, אבל הראשון חטא בחטא שבין אדם לחבירו שאפילו יום הכפורים אינו מכפר וכו’. (וראה עוד
בתשובה מאהבה ח »ג תשובה שעה). ולכן בדבר המבואר בשלחן ערוך, אין למורה לפסוק לאחרים (מהספרדים ועדות המזרח) נגד דעת מרן, בין להקל בין להחמיר. (וראה בשו »ת יביע אומר ח »א חיו »ד ס »ס =סוף סימן= ג’). והשי »ת
יצילנו משגיאות, ומתורתו יראנו נפלאות. ויאיר עינינו במאור תורתו הקדושה. אמן.
(en résumé , si quelqu’un veut être ma’hmir cela le regarde mais un Rav n’a pas le droit d’enseigner la ‘houmra directement , juste la stricte halakha)
Cependant, il y a quelque-chose qui me dérange dans cet article et dans d’autres :
La voie du juste milieu consiste à s’écarter des excès dans les deux sens. Il ne s’agit pas de s’en prendre uniquement à ceux qui en font plus, mais aussi à ceux qui en font moins. Et pourtant on
ne voit jamais -quasiment- des appels à respecter la stricte halakha dans le blog.
Regarde le nombre de « likes » sur cet article ainsi que sur ceux qui dénoncent les excès des « religieux’. Pourquoi les gens aiment-ils plus ces articles que les autres ? Parce qu’ils sont d’une
meilleure qualité ? Je ne le pense pas. Ce billet comme les autres est très intéressant et bien référencé. Mais ceux qui ont 50 « likes » de moins le sont également.
Une partie des lecteurs préfère ce genre d’articles car ça les conforte dans leur pratique , tout autant éloignée de la voie du milieu, mais dans l’autre sens. J’ai été choqué d’entendre sur
France-Info le journaliste se régaler de « la marche des salopes » qui a eu lieu à Jérusalem, des femmes manifestant contre les discriminations sexuelles… jusque-là d’accord…… quasiment nues en
déambulant comme-ça aux yeux de tous.
Voici un aussi un excès qu’il convient de condamner tout autant sinon plus que la ‘houmra à l’excès ! J’aimerais bien voir dans le blog un billet qui remette les points sur les « i » sur ce genre de
dérives antireligieuses.
Pour rester dans la voie du juste milieu, il faut regarder chaque cas avec objectivité. Au sujet de la perruque et des pantalons pour femmes tu as mis en avant des « mélamdé z’hout ». Très bien. Mais
quand il s’agit de ceux qui vont au-delà de ce que la Halakha demande, tu n’en trouves aucun, alors qu’il est aussi possible de juger favorablement. Par exemple, il faut garder à l’esprit que les
extrêmes attirent les extrêmes, et que la course à la ‘houmrot n’est sûrement rien d’autre qu’une réaction contre la course à la débauche que l’on voit actuellement.
Dans les mots du Rambam ça passe mieux :
« Cependant , s’il est vrai qu’à certaines époques , quelques sages ont orienté leur conduite vers l’un des extrêmes (…) ils l’ont fait tout simplement à titre de remède (…) et aussi à cause de
la corruption des gens de la ville. Voyant qu’en les fréquentant et en observant leurs actes, ils risquaient de corrompre leurs propres dispositions à ce contact, ils s’en sont éloignés (…) »
(chmona prakim- 4)
Évidemment le Rambam fustige par la suite ceux qui pensent que la ‘houmra à l’excès est bonne en soi, mais il permet d’apporter un début de limoud z’hout sur ceux qui en font trop.
J’ai appris beaucoup sur la MO grâce à toi depuis le temps que je fréquente le blog, et je ne prétends pas te donner de leçons dans ton domaine. Ceci-dit, dans « modern-orthodox » il y a aussi
« orthodoxe » et quand on essaye de vivre une vie de Halakha, on doit aussi savoir taper du poing sur la table pour s’élever contre cette corruption des mœurs et le non respect effronté de la Torah.
Même si on est moderne.
En toute amitié
Yona
Shavoua Tov,
Pour ajouter une anecdote à votre blog (lu sur universtorah) au sujet de Rav Shlomo Zalman Auerbach :
Un homme s’était un jour présenté à lui pour une question halakhique pratique : dans la mesure où le principe du ‘Erouv est souvent sujet à caution, il souhaitait faire preuve de rigueur à ce sujet
et prendre sur lui la ‘houmra de ne plus porter davantage dans le domaine public le jour du Chabbat.
Mais à la place des compliments qu’il s’attendait à recevoir, la réponse que lui donna Rav Chlomo Zalman n’abonda pas du tout en son sens : « Rien ne vous retient de continuer à agir suivant la
coutume de vos parents. Mais sachez que si vous souhaitez prendre sur vous une rigueur supplémentaire, il vous faut en premier lieu étudier la question et approfondir les différents aspects
halakhiques. C’est seulement une fois que vous serez convaincu de la pertinence d’une ‘houmra qu’il conviendra de l’appliquer ! Mais il ne faut en aucun cas se contenter d’imiter simplement les
‘rigueurs’ des autres ! ».
Très intéressant comme toujours!
L’analyse historique que tu fais des raisons pour lesquelles les Juifs modernes sont désemparés devant la multiplicité des autorités, et la perte des repères traditionnels rejoint certaines
questions que je me pose, je crois t’en avoir déjà évoquées quelques unes. De vraies questions se posent: quelle est la tradition du fils d’un père d’origine algérienne par son père et polonais par
sa mère, qui a appris le judaïsme par son grand père maternel, et d’une mère d’origine russe par son père communiste athée et de mère italienne convertie au judaïsme?
Hannah Arendt définissait dans la crise de la culture, si j’ai bonne mémoire, l’homme cultivé comme celui qui sait choisir ses amis parmi les vivants comme parmi les morts, et j’aime beaucoup cette
idée qui se rapproche de ces questions de minhaguim et de houmrot puisqu’il s’agit de choisir ses maîtres dans la tradition héritée comme parmi les vivants…
Aujourd’hui au fond, chacun est libre de choisir sa communauté. Demain peut-être il n’y aura plus d’identité entre une communauté physique, une synagogue, et les allégeances halakhico-théologiques
de ses membres. Tu ne réponds pas, et ne cherches pas à répondre, à la question de savoir comment choisir. Tu mets simplement en garde contre la tentation, qui est grande, de juger systématiquement
plus « légitime » l’avis le plus « strict » et le plus contraignant. Il n’en reste pas moins que beaucoup de juifs « désirent » ces contraintes. Et même ceux qui les refusent pour eux-mêmes pensent le
plus souvent que la plus grande contrainte est la marque de la plus grande ferveur et de la plus grande rigueur. Ce qui accentue encore la difficulté à s’inscrire dans une tradition « choisie »
Une autre question m’est venue à la lecture de l’avis du Rav Fenstein sur l’utilisation de moyens modernes, qui est importante. Je ne sais pas en effet si l’argument qu’il utilise est celui que je
trouve le plus convainquant. Je ne comprends pas la notion de « faute par manque de moyens ». Est-ce une catégorie de la torah? Y a-t-il des exemples de fautes qu’on pourrait commettre par manques de
moyen, ou n’est-il pas toujours et par principe admis, comme je le croyais, que le respect de la torah se mesure à l’échelle de nos moyens? Inversement, est-ce qu’au nom de cet argument, il faut
rejeter la recherche d’écailles d’esturgeons au microscrope? Est-ce que ce n’est pas une catégorie un peu commode, qui permet sans l’afficher de dénoncer comme ridicule, et culpabilisatrice, l’idée
d’inventer une nouvelle houmra pour cette seule raison qu’il existe de nouveaux moyens techniques de contrôler le respect de certains interdits?
Merci. Ma question est: qu’est-ce qu’une « faute par manque de moyens », cette catégorie existe-t-elle et en a-t-on des exemples?
Salut,
J’imagine alors que tu ne deviendras pas membre de ce club:
http://people.hofstra.edu/daniel_j_greenwood/ganzehgalus/chumra.htm
:))
Bonjour,
Tout d’abord, je voudrais dire que l’article est appréciable et que partage bien entendu ce qui est dit dedans. J’ai d’ailleurs donné un shiour cet après-midi sur la voie du milieu selon hilkhot
déot et le quatrième chapitre des shmona prakim, et j’arrive à des conclusions similaires. Le Yérouchalmi rapporté est assez éloquent et traduit bien l’esprit de l’article : « ce que la Torah t’a
interdit ne te suffit-il pas pour que tu doives encore y ajouter d’autres prohibitions » (TJ Nédarim 9, 1). Tu as vu dans le même esprit que les responsa citées dans le billet le shou »t du Rama que
je recopie à l’attention d’Emmanuel qui n’a pas la chance d’être dans le BHF :
ובתשו’ הרמ »א (ס »ס נד) כ’, ומ »ש מעכ »ת להחמיר על עצמו שלא לאכול משמן זית שנמצא בחביות עץ, מפני שמחליקים את החביות בשומן חזיר, מאחר שכתבנו כל הני טעמי להיתר, ופוק חזי מאי עמא דבר, אינו רשאי להחמיר על
עצמו, כדאמרי’ בירוש’ [פ »ב דע »ז ה »ח] רבי ובית דינו התירו השמן, שמואל אכל, רב לא קבל עליה מיכול, א »ל שמואל אכול ואי לא אנא כתב עליך זקן ממרא, אטרח עליה ואכל. והובא בתוס’ (ע »ז לו). וכן אמרו בירושלמי
[פ »ט דנדרים ה »א], לא דייך מה שאסרה תורה אלא שאתה אוסר עליך דברים אחרים. והפטור מדבר ועושהו נקרא הדיוט. ומה שהביא מעכ »ת ראיה מיחזקאל שלא אכל מבהמה שהורה בה חכם, לא דמי לנ »ד, שמנהג פשוט בכל ישראל
לאוכלו, ולית דחש ביה כלל. עכת »ד
(en résumé il met aussi en garde contre les ‘houmrot)
Pour quelque chose de pratique qui concerne tout le monde, voir au sujet de ces fameuses ‘houmrot de Pessa’h ce qu’écrit Rav Ovadia Yossef :
שו »ת יחווה דעת חלק א סימן יא
והנה אחינו האשכנזים נהגו להחמיר בכל זה כדברי הרמ »א הנ »ל, שלא לאכול בשר ודגים וגבינה כשלא נזהרו לשומרם באופן מיוחד שיהיו כשרים לפסח, וגם מבני עדות המזרח יש חסידים ואנשי מעשה המחמירים על עצמם בכל זה.
וישראל קדושים קבלו על עצמם חומרות רבות בפסח משום חומרות האיסור של החמץ. אולם הרב המורה הוראה לרבים צריך להורות כדעת מרן שקבלנו הוראותיו בין להקל בין להחמיר. וכמ »ש מרן החיד »א במחזיק ברכה (סי’ תס »ז
סק »ה), שאף שכל אחד נוהג להחמיר על עצמו בהלכות פסח כאשר תאוה נפשו, את צנועים חכמה להחמיר רק בביתו ובחומותיו, וכל מה שיוכל יתחמק מלגלות מסתוריו לבני אדם. ותלמיד חכם שהגיע להוראה יורה על פי הדין דוקא
ע »כ. וכן כתב בשו »ת חקרי לב (חאו »ח סי’ צ »ה – צ »ו) ובמהדורא בתרא (חלק חושן משפט, דף ק »פ ע »ג), שדיין ומורה צדק אינו רשאי להורות נגד דעת מרן שקבלנו הוראותיו. וכן כתב בשו »ת תעלומות לב ח »ב (חלק אבן העזר
סי’ ה’, דף י »ז ע »ב והלאה). ואמנם הרה »ג אלקלעי בספר זכור לאברהם (ריש הלכות פסח) כתב, אנו נוהגים להחמיר כדעת הרמ »א בדין חוזר וניעור בממשו, ובכל דיני פסח, באופן שלענין פסח אנו אשכנזים. כן אמר לי הרה »ג
עט »ר מר רב »י ע »כ. ונמשך אחריו הרה »ג ר’ יעקב סופר בכף החיים (סי’ תמ »ז אות ע »ו ורכ »ח, ובסימן תס »ז אות קי »ז ועוד) ע »ש. אולם באמת שהעיקר כדברי מרן החיד »א במחזיק ברכה הנ »ל, שגם בדיני פסח אין הרב המורה
רשאי להורות לאחרים אלא על פי הדין דוקא, וזהו כדעת מרן השלחן ערוך שקבלנו הוראותיו. וכן כתב הגאון ר’ אברהם ענתבי בספר חכמה ומוסר (דרך חקיך אות צ »ג), שיותר טוב שלא לנהוג כסברת מי שאומר חוזר וניעור
בפסח, אלא כדעת מרן השלחן ערוך שפסק אינו חוזר וניעור. ועל זה נאמר: אל תהי צדיק הרבה. ועל ידי כך ינצל מכמה מכשולות. ובשאר דברים שנחלקו הפוסקים ראוי לתלמיד חכם להחמיר על עצמו ולהקל לאחרים ע »כ. וכן כתב
הרה »ג ר’ משה שתרוג בשו »ת ישיב משה ח »א (סי’ קפ »ח): קבלנו שבכל מקום שהגאון ר’ יצחק טאייב הכריע בספרו ערך השלחן להחמיר נגד דעת מרן, רק לעצמו היה מחמיר, אבל לאחרים היה מורה להקל כדעת מרן שקבלנו
הוראותיו ע »כ. וכ »כ בשו »ת שואל ונשאל ח »ג (סי’ כ »ג). ועיין להרא »ש (נדה פרק י’ סי’ ג’) שכתב: שאנו אין לנו להחמיר אלא מה שמוצאים בש »ס, ואם אדם חשוב מרוב ענותו ופרישותו אינו רוצה לסמוך על עצמו לעשות
מעשה להקל, ינהג מדת פרישותו לעצמו, אבל לא ניתן ליכתב בספר להורות בו חומרא לדורות הבאים, וכל שכן שלא יורה אדם להחמיר לאחרים מדעתו אם לא שיביא ראיות ברורות מן הש »ס. וכבר אמרו חכמים לרבן גמליאל,
(בביצה כא ע »ב), מה נעשה לבית אביך שהיו מחמירים על עצמם ומקילים לכל ישראל ע »ש. וכ »כ הב »ח (יו »ד סי’ קפ »ז). והנודע ביהודה קמא (חיו »ד סי’ מ »ו). ע »ש. ועיין בתשובה מאהבה ח »א (סי’ קפ »א) שכתב, מי ששגג
והורה לאסור לאחרים שלא כדין, חמור עונשו ממי ששגג והורה להקל שלא כדין, שהאחרון חטאו בין אדם למקום, ושב ורפא לו, אבל הראשון חטא בחטא שבין אדם לחבירו שאפילו יום הכפורים אינו מכפר וכו’. (וראה עוד
בתשובה מאהבה ח »ג תשובה שעה). ולכן בדבר המבואר בשלחן ערוך, אין למורה לפסוק לאחרים (מהספרדים ועדות המזרח) נגד דעת מרן, בין להקל בין להחמיר. (וראה בשו »ת יביע אומר ח »א חיו »ד ס »ס =סוף סימן= ג’). והשי »ת
יצילנו משגיאות, ומתורתו יראנו נפלאות. ויאיר עינינו במאור תורתו הקדושה. אמן.
(en résumé , si quelqu’un veut être ma’hmir cela le regarde mais un Rav n’a pas le droit d’enseigner la ‘houmra directement , juste la stricte halakha)
Cependant, il y a quelque-chose qui me dérange dans cet article et dans d’autres :
La voie du juste milieu consiste à s’écarter des excès dans les deux sens. Il ne s’agit pas de s’en prendre uniquement à ceux qui en font plus, mais aussi à ceux qui en font moins. Et pourtant on
ne voit jamais -quasiment- des appels à respecter la stricte halakha dans le blog.
Regarde le nombre de « likes » sur cet article ainsi que sur ceux qui dénoncent les excès des « religieux’. Pourquoi les gens aiment-ils plus ces articles que les autres ? Parce qu’ils sont d’une
meilleure qualité ? Je ne le pense pas. Ce billet comme les autres est très intéressant et bien référencé. Mais ceux qui ont 50 « likes » de moins le sont également.
Une partie des lecteurs préfère ce genre d’articles car ça les conforte dans leur pratique , tout autant éloignée de la voie du milieu, mais dans l’autre sens. J’ai été choqué d’entendre sur
France-Info le journaliste se régaler de « la marche des salopes » qui a eu lieu à Jérusalem, des femmes manifestant contre les discriminations sexuelles… jusque-là d’accord…… quasiment nues en
déambulant comme-ça aux yeux de tous.
Voici un aussi un excès qu’il convient de condamner tout autant sinon plus que la ‘houmra à l’excès ! J’aimerais bien voir dans le blog un billet qui remette les points sur les « i » sur ce genre de
dérives antireligieuses.
Pour rester dans la voie du juste milieu, il faut regarder chaque cas avec objectivité. Au sujet de la perruque et des pantalons pour femmes tu as mis en avant des « mélamdé z’hout ». Très bien. Mais
quand il s’agit de ceux qui vont au-delà de ce que la Halakha demande, tu n’en trouves aucun, alors qu’il est aussi possible de juger favorablement. Par exemple, il faut garder à l’esprit que les
extrêmes attirent les extrêmes, et que la course à la ‘houmrot n’est sûrement rien d’autre qu’une réaction contre la course à la débauche que l’on voit actuellement.
Dans les mots du Rambam ça passe mieux :
« Cependant , s’il est vrai qu’à certaines époques , quelques sages ont orienté leur conduite vers l’un des extrêmes (…) ils l’ont fait tout simplement à titre de remède (…) et aussi à cause de
la corruption des gens de la ville. Voyant qu’en les fréquentant et en observant leurs actes, ils risquaient de corrompre leurs propres dispositions à ce contact, ils s’en sont éloignés (…) »
(chmona prakim- 4)
Évidemment le Rambam fustige par la suite ceux qui pensent que la ‘houmra à l’excès est bonne en soi, mais il permet d’apporter un début de limoud z’hout sur ceux qui en font trop.
J’ai appris beaucoup sur la MO grâce à toi depuis le temps que je fréquente le blog, et je ne prétends pas te donner de leçons dans ton domaine. Ceci-dit, dans « modern-orthodox » il y a aussi
« orthodoxe » et quand on essaye de vivre une vie de Halakha, on doit aussi savoir taper du poing sur la table pour s’élever contre cette corruption des mœurs et le non respect effronté de la Torah.
Même si on est moderne.
En toute amitié
Yona
Shavoua Tov,
Pour ajouter une anecdote à votre blog (lu sur universtorah) au sujet de Rav Shlomo Zalman Auerbach :
Un homme s’était un jour présenté à lui pour une question halakhique pratique : dans la mesure où le principe du ‘Erouv est souvent sujet à caution, il souhaitait faire preuve de rigueur à ce sujet
et prendre sur lui la ‘houmra de ne plus porter davantage dans le domaine public le jour du Chabbat.
Mais à la place des compliments qu’il s’attendait à recevoir, la réponse que lui donna Rav Chlomo Zalman n’abonda pas du tout en son sens : « Rien ne vous retient de continuer à agir suivant la
coutume de vos parents. Mais sachez que si vous souhaitez prendre sur vous une rigueur supplémentaire, il vous faut en premier lieu étudier la question et approfondir les différents aspects
halakhiques. C’est seulement une fois que vous serez convaincu de la pertinence d’une ‘houmra qu’il conviendra de l’appliquer ! Mais il ne faut en aucun cas se contenter d’imiter simplement les
‘rigueurs’ des autres ! ».
Très intéressant comme toujours!
L’analyse historique que tu fais des raisons pour lesquelles les Juifs modernes sont désemparés devant la multiplicité des autorités, et la perte des repères traditionnels rejoint certaines
questions que je me pose, je crois t’en avoir déjà évoquées quelques unes. De vraies questions se posent: quelle est la tradition du fils d’un père d’origine algérienne par son père et polonais par
sa mère, qui a appris le judaïsme par son grand père maternel, et d’une mère d’origine russe par son père communiste athée et de mère italienne convertie au judaïsme?
Hannah Arendt définissait dans la crise de la culture, si j’ai bonne mémoire, l’homme cultivé comme celui qui sait choisir ses amis parmi les vivants comme parmi les morts, et j’aime beaucoup cette
idée qui se rapproche de ces questions de minhaguim et de houmrot puisqu’il s’agit de choisir ses maîtres dans la tradition héritée comme parmi les vivants…
Aujourd’hui au fond, chacun est libre de choisir sa communauté. Demain peut-être il n’y aura plus d’identité entre une communauté physique, une synagogue, et les allégeances halakhico-théologiques
de ses membres. Tu ne réponds pas, et ne cherches pas à répondre, à la question de savoir comment choisir. Tu mets simplement en garde contre la tentation, qui est grande, de juger systématiquement
plus « légitime » l’avis le plus « strict » et le plus contraignant. Il n’en reste pas moins que beaucoup de juifs « désirent » ces contraintes. Et même ceux qui les refusent pour eux-mêmes pensent le
plus souvent que la plus grande contrainte est la marque de la plus grande ferveur et de la plus grande rigueur. Ce qui accentue encore la difficulté à s’inscrire dans une tradition « choisie »
Une autre question m’est venue à la lecture de l’avis du Rav Fenstein sur l’utilisation de moyens modernes, qui est importante. Je ne sais pas en effet si l’argument qu’il utilise est celui que je
trouve le plus convainquant. Je ne comprends pas la notion de « faute par manque de moyens ». Est-ce une catégorie de la torah? Y a-t-il des exemples de fautes qu’on pourrait commettre par manques de
moyen, ou n’est-il pas toujours et par principe admis, comme je le croyais, que le respect de la torah se mesure à l’échelle de nos moyens? Inversement, est-ce qu’au nom de cet argument, il faut
rejeter la recherche d’écailles d’esturgeons au microscrope? Est-ce que ce n’est pas une catégorie un peu commode, qui permet sans l’afficher de dénoncer comme ridicule, et culpabilisatrice, l’idée
d’inventer une nouvelle houmra pour cette seule raison qu’il existe de nouveaux moyens techniques de contrôler le respect de certains interdits?
Merci. Ma question est: qu’est-ce qu’une « faute par manque de moyens », cette catégorie existe-t-elle et en a-t-on des exemples?
Salut,
J’imagine alors que tu ne deviendras pas membre de ce club:
http://people.hofstra.edu/daniel_j_greenwood/ganzehgalus/chumra.htm
:))
Bonjour,
Tout d’abord, je voudrais dire que l’article est appréciable et que partage bien entendu ce qui est dit dedans. J’ai d’ailleurs donné un shiour cet après-midi sur la voie du milieu selon hilkhot
déot et le quatrième chapitre des shmona prakim, et j’arrive à des conclusions similaires. Le Yérouchalmi rapporté est assez éloquent et traduit bien l’esprit de l’article : « ce que la Torah t’a
interdit ne te suffit-il pas pour que tu doives encore y ajouter d’autres prohibitions » (TJ Nédarim 9, 1). Tu as vu dans le même esprit que les responsa citées dans le billet le shou »t du Rama que
je recopie à l’attention d’Emmanuel qui n’a pas la chance d’être dans le BHF :
ובתשו’ הרמ »א (ס »ס נד) כ’, ומ »ש מעכ »ת להחמיר על עצמו שלא לאכול משמן זית שנמצא בחביות עץ, מפני שמחליקים את החביות בשומן חזיר, מאחר שכתבנו כל הני טעמי להיתר, ופוק חזי מאי עמא דבר, אינו רשאי להחמיר על
עצמו, כדאמרי’ בירוש’ [פ »ב דע »ז ה »ח] רבי ובית דינו התירו השמן, שמואל אכל, רב לא קבל עליה מיכול, א »ל שמואל אכול ואי לא אנא כתב עליך זקן ממרא, אטרח עליה ואכל. והובא בתוס’ (ע »ז לו). וכן אמרו בירושלמי
[פ »ט דנדרים ה »א], לא דייך מה שאסרה תורה אלא שאתה אוסר עליך דברים אחרים. והפטור מדבר ועושהו נקרא הדיוט. ומה שהביא מעכ »ת ראיה מיחזקאל שלא אכל מבהמה שהורה בה חכם, לא דמי לנ »ד, שמנהג פשוט בכל ישראל
לאוכלו, ולית דחש ביה כלל. עכת »ד
(en résumé il met aussi en garde contre les ‘houmrot)
Pour quelque chose de pratique qui concerne tout le monde, voir au sujet de ces fameuses ‘houmrot de Pessa’h ce qu’écrit Rav Ovadia Yossef :
שו »ת יחווה דעת חלק א סימן יא
והנה אחינו האשכנזים נהגו להחמיר בכל זה כדברי הרמ »א הנ »ל, שלא לאכול בשר ודגים וגבינה כשלא נזהרו לשומרם באופן מיוחד שיהיו כשרים לפסח, וגם מבני עדות המזרח יש חסידים ואנשי מעשה המחמירים על עצמם בכל זה.
וישראל קדושים קבלו על עצמם חומרות רבות בפסח משום חומרות האיסור של החמץ. אולם הרב המורה הוראה לרבים צריך להורות כדעת מרן שקבלנו הוראותיו בין להקל בין להחמיר. וכמ »ש מרן החיד »א במחזיק ברכה (סי’ תס »ז
סק »ה), שאף שכל אחד נוהג להחמיר על עצמו בהלכות פסח כאשר תאוה נפשו, את צנועים חכמה להחמיר רק בביתו ובחומותיו, וכל מה שיוכל יתחמק מלגלות מסתוריו לבני אדם. ותלמיד חכם שהגיע להוראה יורה על פי הדין דוקא
ע »כ. וכן כתב בשו »ת חקרי לב (חאו »ח סי’ צ »ה – צ »ו) ובמהדורא בתרא (חלק חושן משפט, דף ק »פ ע »ג), שדיין ומורה צדק אינו רשאי להורות נגד דעת מרן שקבלנו הוראותיו. וכן כתב בשו »ת תעלומות לב ח »ב (חלק אבן העזר
סי’ ה’, דף י »ז ע »ב והלאה). ואמנם הרה »ג אלקלעי בספר זכור לאברהם (ריש הלכות פסח) כתב, אנו נוהגים להחמיר כדעת הרמ »א בדין חוזר וניעור בממשו, ובכל דיני פסח, באופן שלענין פסח אנו אשכנזים. כן אמר לי הרה »ג
עט »ר מר רב »י ע »כ. ונמשך אחריו הרה »ג ר’ יעקב סופר בכף החיים (סי’ תמ »ז אות ע »ו ורכ »ח, ובסימן תס »ז אות קי »ז ועוד) ע »ש. אולם באמת שהעיקר כדברי מרן החיד »א במחזיק ברכה הנ »ל, שגם בדיני פסח אין הרב המורה
רשאי להורות לאחרים אלא על פי הדין דוקא, וזהו כדעת מרן השלחן ערוך שקבלנו הוראותיו. וכן כתב הגאון ר’ אברהם ענתבי בספר חכמה ומוסר (דרך חקיך אות צ »ג), שיותר טוב שלא לנהוג כסברת מי שאומר חוזר וניעור
בפסח, אלא כדעת מרן השלחן ערוך שפסק אינו חוזר וניעור. ועל זה נאמר: אל תהי צדיק הרבה. ועל ידי כך ינצל מכמה מכשולות. ובשאר דברים שנחלקו הפוסקים ראוי לתלמיד חכם להחמיר על עצמו ולהקל לאחרים ע »כ. וכן כתב
הרה »ג ר’ משה שתרוג בשו »ת ישיב משה ח »א (סי’ קפ »ח): קבלנו שבכל מקום שהגאון ר’ יצחק טאייב הכריע בספרו ערך השלחן להחמיר נגד דעת מרן, רק לעצמו היה מחמיר, אבל לאחרים היה מורה להקל כדעת מרן שקבלנו
הוראותיו ע »כ. וכ »כ בשו »ת שואל ונשאל ח »ג (סי’ כ »ג). ועיין להרא »ש (נדה פרק י’ סי’ ג’) שכתב: שאנו אין לנו להחמיר אלא מה שמוצאים בש »ס, ואם אדם חשוב מרוב ענותו ופרישותו אינו רוצה לסמוך על עצמו לעשות
מעשה להקל, ינהג מדת פרישותו לעצמו, אבל לא ניתן ליכתב בספר להורות בו חומרא לדורות הבאים, וכל שכן שלא יורה אדם להחמיר לאחרים מדעתו אם לא שיביא ראיות ברורות מן הש »ס. וכבר אמרו חכמים לרבן גמליאל,
(בביצה כא ע »ב), מה נעשה לבית אביך שהיו מחמירים על עצמם ומקילים לכל ישראל ע »ש. וכ »כ הב »ח (יו »ד סי’ קפ »ז). והנודע ביהודה קמא (חיו »ד סי’ מ »ו). ע »ש. ועיין בתשובה מאהבה ח »א (סי’ קפ »א) שכתב, מי ששגג
והורה לאסור לאחרים שלא כדין, חמור עונשו ממי ששגג והורה להקל שלא כדין, שהאחרון חטאו בין אדם למקום, ושב ורפא לו, אבל הראשון חטא בחטא שבין אדם לחבירו שאפילו יום הכפורים אינו מכפר וכו’. (וראה עוד
בתשובה מאהבה ח »ג תשובה שעה). ולכן בדבר המבואר בשלחן ערוך, אין למורה לפסוק לאחרים (מהספרדים ועדות המזרח) נגד דעת מרן, בין להקל בין להחמיר. (וראה בשו »ת יביע אומר ח »א חיו »ד ס »ס =סוף סימן= ג’). והשי »ת
יצילנו משגיאות, ומתורתו יראנו נפלאות. ויאיר עינינו במאור תורתו הקדושה. אמן.
(en résumé , si quelqu’un veut être ma’hmir cela le regarde mais un Rav n’a pas le droit d’enseigner la ‘houmra directement , juste la stricte halakha)
Cependant, il y a quelque-chose qui me dérange dans cet article et dans d’autres :
La voie du juste milieu consiste à s’écarter des excès dans les deux sens. Il ne s’agit pas de s’en prendre uniquement à ceux qui en font plus, mais aussi à ceux qui en font moins. Et pourtant on
ne voit jamais -quasiment- des appels à respecter la stricte halakha dans le blog.
Regarde le nombre de « likes » sur cet article ainsi que sur ceux qui dénoncent les excès des « religieux’. Pourquoi les gens aiment-ils plus ces articles que les autres ? Parce qu’ils sont d’une
meilleure qualité ? Je ne le pense pas. Ce billet comme les autres est très intéressant et bien référencé. Mais ceux qui ont 50 « likes » de moins le sont également.
Une partie des lecteurs préfère ce genre d’articles car ça les conforte dans leur pratique , tout autant éloignée de la voie du milieu, mais dans l’autre sens. J’ai été choqué d’entendre sur
France-Info le journaliste se régaler de « la marche des salopes » qui a eu lieu à Jérusalem, des femmes manifestant contre les discriminations sexuelles… jusque-là d’accord…… quasiment nues en
déambulant comme-ça aux yeux de tous.
Voici un aussi un excès qu’il convient de condamner tout autant sinon plus que la ‘houmra à l’excès ! J’aimerais bien voir dans le blog un billet qui remette les points sur les « i » sur ce genre de
dérives antireligieuses.
Pour rester dans la voie du juste milieu, il faut regarder chaque cas avec objectivité. Au sujet de la perruque et des pantalons pour femmes tu as mis en avant des « mélamdé z’hout ». Très bien. Mais
quand il s’agit de ceux qui vont au-delà de ce que la Halakha demande, tu n’en trouves aucun, alors qu’il est aussi possible de juger favorablement. Par exemple, il faut garder à l’esprit que les
extrêmes attirent les extrêmes, et que la course à la ‘houmrot n’est sûrement rien d’autre qu’une réaction contre la course à la débauche que l’on voit actuellement.
Dans les mots du Rambam ça passe mieux :
« Cependant , s’il est vrai qu’à certaines époques , quelques sages ont orienté leur conduite vers l’un des extrêmes (…) ils l’ont fait tout simplement à titre de remède (…) et aussi à cause de
la corruption des gens de la ville. Voyant qu’en les fréquentant et en observant leurs actes, ils risquaient de corrompre leurs propres dispositions à ce contact, ils s’en sont éloignés (…) »
(chmona prakim- 4)
Évidemment le Rambam fustige par la suite ceux qui pensent que la ‘houmra à l’excès est bonne en soi, mais il permet d’apporter un début de limoud z’hout sur ceux qui en font trop.
J’ai appris beaucoup sur la MO grâce à toi depuis le temps que je fréquente le blog, et je ne prétends pas te donner de leçons dans ton domaine. Ceci-dit, dans « modern-orthodox » il y a aussi
« orthodoxe » et quand on essaye de vivre une vie de Halakha, on doit aussi savoir taper du poing sur la table pour s’élever contre cette corruption des mœurs et le non respect effronté de la Torah.
Même si on est moderne.
En toute amitié
Yona
Shavoua Tov,
Pour ajouter une anecdote à votre blog (lu sur universtorah) au sujet de Rav Shlomo Zalman Auerbach :
Un homme s’était un jour présenté à lui pour une question halakhique pratique : dans la mesure où le principe du ‘Erouv est souvent sujet à caution, il souhaitait faire preuve de rigueur à ce sujet
et prendre sur lui la ‘houmra de ne plus porter davantage dans le domaine public le jour du Chabbat.
Mais à la place des compliments qu’il s’attendait à recevoir, la réponse que lui donna Rav Chlomo Zalman n’abonda pas du tout en son sens : « Rien ne vous retient de continuer à agir suivant la
coutume de vos parents. Mais sachez que si vous souhaitez prendre sur vous une rigueur supplémentaire, il vous faut en premier lieu étudier la question et approfondir les différents aspects
halakhiques. C’est seulement une fois que vous serez convaincu de la pertinence d’une ‘houmra qu’il conviendra de l’appliquer ! Mais il ne faut en aucun cas se contenter d’imiter simplement les
‘rigueurs’ des autres ! ».
Très intéressant comme toujours!
L’analyse historique que tu fais des raisons pour lesquelles les Juifs modernes sont désemparés devant la multiplicité des autorités, et la perte des repères traditionnels rejoint certaines
questions que je me pose, je crois t’en avoir déjà évoquées quelques unes. De vraies questions se posent: quelle est la tradition du fils d’un père d’origine algérienne par son père et polonais par
sa mère, qui a appris le judaïsme par son grand père maternel, et d’une mère d’origine russe par son père communiste athée et de mère italienne convertie au judaïsme?
Hannah Arendt définissait dans la crise de la culture, si j’ai bonne mémoire, l’homme cultivé comme celui qui sait choisir ses amis parmi les vivants comme parmi les morts, et j’aime beaucoup cette
idée qui se rapproche de ces questions de minhaguim et de houmrot puisqu’il s’agit de choisir ses maîtres dans la tradition héritée comme parmi les vivants…
Aujourd’hui au fond, chacun est libre de choisir sa communauté. Demain peut-être il n’y aura plus d’identité entre une communauté physique, une synagogue, et les allégeances halakhico-théologiques
de ses membres. Tu ne réponds pas, et ne cherches pas à répondre, à la question de savoir comment choisir. Tu mets simplement en garde contre la tentation, qui est grande, de juger systématiquement
plus « légitime » l’avis le plus « strict » et le plus contraignant. Il n’en reste pas moins que beaucoup de juifs « désirent » ces contraintes. Et même ceux qui les refusent pour eux-mêmes pensent le
plus souvent que la plus grande contrainte est la marque de la plus grande ferveur et de la plus grande rigueur. Ce qui accentue encore la difficulté à s’inscrire dans une tradition « choisie »
Une autre question m’est venue à la lecture de l’avis du Rav Fenstein sur l’utilisation de moyens modernes, qui est importante. Je ne sais pas en effet si l’argument qu’il utilise est celui que je
trouve le plus convainquant. Je ne comprends pas la notion de « faute par manque de moyens ». Est-ce une catégorie de la torah? Y a-t-il des exemples de fautes qu’on pourrait commettre par manques de
moyen, ou n’est-il pas toujours et par principe admis, comme je le croyais, que le respect de la torah se mesure à l’échelle de nos moyens? Inversement, est-ce qu’au nom de cet argument, il faut
rejeter la recherche d’écailles d’esturgeons au microscrope? Est-ce que ce n’est pas une catégorie un peu commode, qui permet sans l’afficher de dénoncer comme ridicule, et culpabilisatrice, l’idée
d’inventer une nouvelle houmra pour cette seule raison qu’il existe de nouveaux moyens techniques de contrôler le respect de certains interdits?
Merci. Ma question est: qu’est-ce qu’une « faute par manque de moyens », cette catégorie existe-t-elle et en a-t-on des exemples?